Paris VS Alexandrie. 2 : baptême de fer

Article : Paris VS Alexandrie. 2 : baptême de fer
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16 juin 2014

Paris VS Alexandrie. 2 : baptême de fer

Dans la ville d’Alexandrie en Egypte, les minibus assurent la majeure partie du transport des habitants. Ces véhicules jouent un rôle essentiel dans la vie des Alexandrins. Comme le métro pour les Cairois ou pour les Parisiens, ou encore les taxi-moto pour les Cotonois. Certes, les expériences sont diverses pour les usagers parfois anecdotiques, mais les acteurs des transports ont les mêmes importances sociales dans nos sociétés du Nord ou du Sud.

Etonnant chauffeur Alexandrin

Le mini-bus était devenu pour moi ma moto de Cotonou. A Alexandrie, ces véhicules pullulent dans la ville. Entre 12 et 15 places assises, ils sont pour plupart peints selon leur destination traditionnelle. Mais rien n’est sûr. Il faut toujours demander. Certains signes de la main échangés avec le conducteur, permettent de connaître la destination du véhicule. Difficile de les connaître à l’avance. Notre professeur d’arabe dialectal a dû nous l’enseigné. Sur les parkings ou au bord de la route, aux heures de pointe, c’est la croix et la bannière. Les plus forts physiquement passent. Les faibles, eux, poirotent des heures durant pour se faire une place. Vitesse de pointe, comme dans une course poursuite à la « Fast and furious », les conducteurs de ces bus sont les dieux de la route. Ils ne craignent pas d’indisposer les passagers quand ils fument leur cigarette telle une locomotive. Ils prennent leurs appels au volant, tranquille. La musique est au maximum de son décibel, combinés à des freinages subits à couper le souffle, c’est à faire une crise par monter d’adrénaline ! Mais c’est le moyen de transport de tous les jours, très bon marché où assis, il faut garder une certaine distance avec les femmes. Il arrive même que le chauffeur interdise à un homme de s’asseoir à côté d’une femme ! Bienvenue en Egypte…

Il était une fois… dans le métro au Caire

En mai dernier, j’ai fait l’expérience du métro Cairois. C’était ma toute première fois sur un chemin de fer. Ça n’a pas été sans hésitation. J’avais une préoccupation : comment se rendre au Consulat de France à Giza, une cité de la capitale ? Les Cairois à qui j’ai posé la question m’ont parlé du métro, avec insistance. Le métro ! Oui, le métro ! J’ignorais tout à fait que l’Egypte avait le métro, et tout de son fonctionnement d’ailleurs. Et pourtant, c’était le quotidien des Cairois. J’aborde quelqu’un dans la rue qui accepte de m’initier même s’il ne semble pas très emballer à l’idée de le faire. Je ne sais pas pourquoi. Il m’indique le guichet pour que je prenne le billet. Ça ne me coûte que 0,1 centime pour l’ensemble de la ligne. Autour de moi, il y avait un monde fou, tous aussi pressés que moi qui craignais d’être en retard à mon rendez-vous. Je prends mon billet et au moment de le valider, je me heurte au tourniquet. Dans la longue file d’attente derrière moi, les gens me regardent avec stupéfaction sans m’en tenir rigueur… Je leur faisais perdre du temps de toute façon. Mon souci restait que je ne savais pas où introduire le minuscule billet qui donne accès au quai du métro. Quelqu’un est venu m’aider alors que je m’en prenais à tort au tourniquet. J’étais en sueur. Et le monde qui était autour de moi me déconcertait. Finalement, je m’en suis tiré. Je suis prévenu qu’il faut que je garde jalousement le billet. Alors que je me pressais pour rejoindre le quai, une dame me fait signe de la main pour que je range comme il se doit mon portefeuille encore dans mes mains. Son avertissement est à prendre au sérieux. Je me suis vite ressaisi. Une fois dans le métro, celui a qui on m’a confié revient à la charge m’indiquant où  je dois descendre du métro. Il ne faut donc plus être distrait pour ne pas se tromper de station. A une gare, certains descendent et un monde fou rentre dans le métro. L’étau de personnes se resserre autour de moi. Une minute de panique et je vois certains toucher ou déplacer leur téléphone portable. Je fais aussi le geste pour mettre le mien aussi à l’abri. A la prochaine station, le métro se vide. Il était même possible de s’asseoir sur les quelques banquettes disponibles.

A Paris, le métro au quotidien

Quelques jours plus tard, je vais connaître l’expérience du métro parisien. C’est désormais mon quotidien. J’arrive à peine à intérioriser cette réalité. Crime de lèse-adaptation ! Il faut maintenant se familiariser avec la gamme d’offres que propose le Ratp (Régie autonome des transports parisiens). J’ai besoin d’un titre de transport (le « passe Navigo » comme on l’appelle couramment), d’une carte géographique de Paris et d’apprendre à utiliser le site du Ratp pour connaître les itinéraires à l’avance. Les stations sont correctement référencées avec les indications de lignes de transports ou encore de rue qui conviennent. Mais ce qui apparaît plus compliqué, ce sont les correspondances entre les différents moyens de transports : RER, transilien, bus, tram… et ses pieds aussi. Et, comme me l’a fait remarquer Sinath, Mondoblogueuse, « il suffit juste de savoir lire… ». Je me suis perdu plusieurs fois entre deux stations, mais ce n’est pas faute de savoir lire.

Metro-Paris

Neuf heures. Je me presse pour aller sur le quai du métro. Cette fois-ci, puisque je sais comment ça marche, je ne force pas le tourniquet. Juste derrière moi, quelqu’un me propose de passer avec moi parce qu’il n’a ni billet, ni titre de transport. J’accepte d’être son complice. De l’autre côté, un jeune, la trentaine environ, ne force pas trop son énergie. Il saute par-dessus les verrous pour ne pas perdre du temps. C’est sans compter la présence des contrôleurs, ces gens à l’allure géante, gilet vert qui font des vérifications inopinées. Ils me lancent leur traditionnel « monsieur, puis-je contrôler votre titre de transport s’il vous plaît ? ». Je me laisse contrôler. Non loin, un fraudeur tombe dans la maille. C’est 30 euros d’amende ; il semble bien connaître la règle du jeu… Les pas se pressent autour de moi. Quelques-uns n’hésitent pas à enchaîner des foulées. Le train approche. Non, il est là. Je saute in Il y a du monde. Le mélange de nationalités, de couleurs, de genres, d’odeurs est flagrant. Il y a une ambiance silencieuse. Des gens fermés sur leur téléphone portable pour passer le temps et l’ennui des moyens de transport, pour effacer leur regard de celui des autres. D’autres regards s’éteignent dans le vide pour tenter d’esquiver les autres regards qui peuvent les importuner. Des oreilles sont emballées dans des casques audio. Certains lisent un bouquin. Dans le métro, on ne se parle pas. Bon, c’est normal parce qu’on ne se connaît pas… Une SDF, son enfant au dos, vient troubler ce silence matinal. Elle dresse tout un chapelet de ses conditions misérables et demande aux passagers de poser quelques sous dans sa boîte. Il y en a qui donnent spontanément des centimes, un ou deux euros. Une fois encore, certains détournent leur regard. Au loin, deux tourtereaux s’embrassent. Hétéro ou homo, peu importe. A voir comment ils/elles s’y prennent, le regard des autres a surement quelque chose de stimulant pour eux. Le train va s’arrêter. On entend le vacarme du grincement entre les roues et les rails. Assourdissant ! A une station, le métro s’arrête enfin. Les sièges se vident et s’emplissent à nouveau…

Il y a des jours où l’ambiance est différente. Comme le vendredi, les week-ends, les jours fériés. Des musiciens investissent les couloirs menant aux quais, une petite caisse à côté pour recueillir les dons. D’autres, le métro lui-même. Certains passagers semblent apprécier le moment, chantent aussi avec les musiciens et n’hésitent pas quelques déhanchés. Il y en a aussi qui paraissent agacer par le délire et son bruit. Heureusement pour eux, le show ne dure que quelques minutes.  Ces jours-là, je les aime.

« Zémidjan » à Cotonou

Zém
Un dessin de Hector Sonon

Dans les trains ou dans les bus, il m’est arrivé de penser à Cotonou et à ses taxis-moto (appelé zémidjan). Ce moyen de transport populaire dans les villes du Bénin est incontestablement le moyen le plus utilisé par les béninois. Très efficaces, ces taximans connaissent tous les quartiers de la ville, à quelques exceptions près. Il suffit juste de leur donner une référence connue et le tour est joué. Les risques pour ce moyen de transport à deux roues existent et sont multiples.  Parce que certains conducteurs n’hésitent pas à prendre des chargements hors gabarit, roulent à toute allure au mépris du code de la route. Le prix se négocie à la tête du client. En costume, vous risquez de payer plus cher qu’en tee-shirt et bermuda. Aussi, le métier de zémidjan est devenu une solution précaire pour les jeunes qui pensent échapper au chômage. Et ils sont des milliers à abandonner les champs dans les villages pour investir les villes. Ils connaissent des fortunes diverses mais constituent surtout par leur nombre et leur situation sociale précaire, un outil pour les politiciens. Ce nombre n’est pas maîtrisé. Il n’est d’ailleurs pas possible de le maîtriser.

Mais qu’il s’agisse de motos, de trains ou de bus, les acteurs de ces secteurs ont un poids incontestable dans la société. On le mesure bien quand ils décident d’aller en grève. Suffisamment pathétique pour les usagers !

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Commentaires

Flo
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Bac dans les bacs come back come back comme dirait Christina Aguilera alias Laetizia d'Espagne

Djossè TESSY
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Merci beaucoup Rita. Des fois, il m'arrive de croiser des regards qui, depuis quelques jours, me sont devenus familiers...sans que j'ose faire le premier pas qui serait très mal vu. C'est vraiment des réalités de vie différentes. Mais du point de vue utilité, la question reste posée. J'attends impatiemment de re-prendre un zémidjan. Merci pour ton commentaire

RitaFlower
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3 capitales et 3 modes de transports différents selon chaque pays en fait.Pour le métro parisien,tu as une vision juste du climat qui règne à l'intérieur des Wagons et à l'extérieur aussi.On dirait un autre monde en parallèle.Ceux qui se croisent tous les jours sans jamais oser se parler et se regarder dans les yeux.La remarque de Sinath me fait sourire.Elle sera surprise d'apprendre que meme les gens qui ne savent ni lire ni écrire s'en sortent quant meme.ILs ont leurs codes et leurs astuces pour se déplacer sans importuner les passagers.Je trouve que tu t'es bien adapté à ce type de transport,nouveau pour toi.Pour Cotonou,je reve d'emprumter un taxi-moto mais sans risquer de tomber lol.